jeudi 31 juillet 2014

Ils ont tué Jaurès

Dans l'épopée du roman national, nous sommes promis à une fin d'année consacrée à la "Der des ders", la grande guerre, la "Première Guerre Mondiale", qui a commencé il y a tout juste un siècle.
Certaines commémorations du 14 juillet (Fête de la Nation = prise de la Bastille = Révolution populaire) ont déjà été "entachées" de ce centenaire... On oublie un peu trop qu'un homme, parmi d'autres, quoique plus visible que les autres, a tout fait pour l'empêcher, et qu'il en est mort.

Né dans une famille d'exploitants agricoles, premier à l'Ecole Normale Supérieure en philosophie, journaliste républicain, puis suite à une grève des mineurs de Carmaux il unifit les mouvements socialistes, il est de ceux qui s'opposent à une guerre qui ne profitera qu'à ceux qui ne la feront pas.

Il sera assassiné par un patriote, qui croit que la guerre défend la nation, et que la nation est le peuple.
Gramsci écrira "En assassinant Jaurès, l'idée national a été logique, jusqu'à l'absurde. Elle demande pour elle-même à ses adversaires, sur la base de leurs principes, la liberté la plus totale, mais, sur la base de ses propres principes, elle leur nie toute liberté.
Elle considère les hommes comme des choses, non comme des êtres pensants, non comme les artisans divins de l'Univers. Et elle abat les meilleurs parmi eux pour étrangler la voix des masses, pour éclipser la conscience collective. Parce que, en niant la liberté, elle n'en connaît pas la valeur ni la force. Parce qu'elle croit, comme la toujours cru la réaction, que brûler un livre signifie détruire une idée, et que tuer un homme rend esclaves tous les autres hommes." [GRAMSCI Antonio, 1916 : article dans Avanti!]

Je ne suis pas sûr de puiser mon anti-patriotisme dans le combat de Jaurès, j'ai à peine survolé quelques uns de ses écrits, et pourtant, je me sens nourri de son esprit et de sa pensée. On lui prête une phrase, à un journaliste qui lui faisait remarquer qu'il mangeait du poulet (qui coûtait cher à cette époque) : "le socialisme, ce n'est pas priver ceux qui en ont les moyens de manger du poulet, c'est permettre à tout le monde de manger du poulet" (assurément pas la même trempe que les socialistes actuels...), et j'aime cette vision.

"Sa commémoration, pourtant, n'est pas un banal rappel à ceux qui n'ont pas de mémoire, pas plus qu'il n'est un rituel académique par lequel on voudrait glorifier un homme et créer une idole. C'est une affirmation de la vie, la glorification d'une idée." [GRAMSCI, id.]. Et j'aime penser que cette idée est celle de la paix, et donc de la justice.



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