mardi 15 février 2022

Le niveau baisse...

Oui, c'est une phrase de vieux con, « c'était mieux avant », pourtant c'est ce que je ressens avec mes élèves. Permettez que je m'explique.

 

En début d'année je fais remplir aux entrants (les élèves de Seconde) une fiche de rentrée culturelle, pour savoir où les situer et si je peux trouver un moyen de les accrocher : le dernier livre lu (un bande dessinée compte), le dernier film (la série télé est refusée, ce n'est pas la même démarche), l'exposition, etc. Ca c'est pour la culture que nous qualifierons de bourgeoise, souvent je n'ai aucune réponse à cette liste, même les lectures obligatoires du collège ont été sacrifiées, et lire un livre quand on est enfant semble désormais un truc des classes supérieures. 


Viennent ensuite des questions de culture populaire : leur artiste préféré.e dans le domaine musical (Jul et Wejdene l'emportent loin devant tout le monde), leur personnalité préférée dans les domaines sportifs (j'inclus désormais les e-sports dans cette catégorie) et leurs loisirs (et là j'ouvre aussi bien à la musique, au sport, aux jeux vidéos, qu'à 'scroller' TikTok ou 'snapper' toute la nuit).

Et cette année j'ai eu la surprise de n'avoir aucune réponse dans cette partie là non plus pour énormément d'enfants ! C'est-à-dire qu'on est en présence d'une aculturation grandissante, et personne ne semble voir le problème.

En fait cela révèle une problématique grave qui va au-delà de ce que l'école peut fournir : une majorité d'enfants a été élevée par les écrans. Dès la maternelle ils ont un téléphone mobile... Pour faire quoi ? Ils n'ont personne à appeler, ils n'ont pas de recherche à mener sur les bases de connaissances mondiales que sont ces réseaux ! Ils vont simplement consommer, des images, souvent mal intentionnées, et s'y conformer.
Il n'y a plus de réflexion.

Et c'est grave parce qu'il y a des activités qui permettent de développer les connexion neuronales qui ne sont plus pratiquées, et on des enfants de moins en moins aptes à penser, à réfléchir.


Et je me rends compte encore mieux de l'influence des écrans sur nos enfants quand je commence ma longue séquence sur l'identité graphique professionnelle. En gros, il va falloir se créer un logo, et pour cela on va passer par dessiner les lettres, donc on introduit la séquence par une analyse de polices de caractères.



Il y en a 15, et la première question est de nommer les 3 polices manuscrites.

Je n'attends pas que tout le monde sache ce que veut dire manuscrite, c'est une bonne occasion pour aborder le vocabulaire : manuscrite, peinte, tapuscrite, infographique. Je simplifie donc en disant que manuscrite est synonyme de manuelle : comment écrivez-vous, vous, à la main ?

Une majorité d'élève lâche l'affaire parce qu'il faut réfléchir à une question...

Mais surtout, parmi les élèves qui répondent, qui font l'effort, une majorité me choisit des polices de caractères créées pour l'informatique !

Logique : ils écrivent comme cela parce que ce sont ces formes de lettres qu'ils voient tout le temps, partout !

Qui écrit encore des cartes postales ?

Et il faut que je leur rappelle qu'ils ont fait des lignes d'écriture quand ils étaient en cours primaire, et que c'est cela que l'on appelle manuscrite. Parce que désormais, les écritures manuelles sont celles des écrans.


Il y aurait beaucoup à dire sur les écrans, dans l'enseignement, j'ai jeté un œil à quelques études neuro-scientifiques intéressantes à ce sujet, je ne vais pas épiloguer dessus.

Ma question est plutôt : comment suis-je sensé m'adresser à des enfants qui ont une capacité d'attention de 10 secondes, qui n'ont pas les fondements cognitifs nécessaires à aborder les problématiques complexes que nous devons développer, et qui n'ont pas d'appui culturel suffisant pour ne pas se faire bouffer ?

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